Archives de catégorie : Textes divers

Peur sur la vie

« Quand tout le monde vous ment en permanence, le résultat n’est pas que vous croyez ces mensonges, mais que plus personne ne croit plus rien. Un peuple qui ne peut plus rien croire ne peut se faire une opinion. Il est privé non seulement de sa capacité d’agir mais aussi de sa capacité de penser et de juger. Et avec un tel peuple vous pouvez faire ce qu’il vous plaît. » Hannah Arendt

« Dans ce moment de panique, je n’ai peur que de ceux qui ont peur. » Victor Hugo

La peur : une réaction naturelle

En ces temps d’imposture universelle, chercher et dire la vérité (cette espèce en voie de disparition) est un acte révolutionnaire. En cette période de crise, la confusion est portée à son paroxysme afin de noyer le poisson, détourner notre attention, pour que l’arnaque soit totale. Un des leviers du système dictatorial, dans lequel nous survivons, est la peur : généralisée, intériorisée, banalisée. Pourtant la peur fait partie intégrante du comportement naturel d’homo sapiens. La peur est une réaction normale face à une situation dangereuse imminente ou pas. Mais comme d’autres émotions humaines, la façon dont elle s’exprime peut être maîtrisée ou déformée. Des comportements irrationnels, injustifiés, dus à la peur, sont fréquents pour diverses raisons : traumatisme, manipulation, préjugé, ignorance, phobie…

Nous avons peur depuis quelques mois d’un virus ayant un taux de létalité réel inférieur à 0,8 %. Dans certains pays où des dépistages massifs ont été effectués, le nombre de cas asymptomatique oscille entre 50 et 75 %. Un confinement de la population et un état d’urgence ont été mis en place pour une épidémie dont 75 % des hospitalisations et 93 % des personnes décédées en France ont plus de 65 ans. Les personnes les plus touchées sont les plus vulnérables : celles ayant des antécédents médicaux, les personnes âgées, les plus pauvres. La moitié des décès ont lieu dans des EHPAD, dont beaucoup manquent de personnels et de moyens. Depuis quarante ans, plusieurs dizaines de milliers de lits dans les hôpitaux publics ont été supprimés pour cause d’austérité budgétaire. Les hôpitaux et cliniques privées n’ont pas été réquisitionnés lors du pic épidémique. Est-ce qu’on se rend compte de ce qui se joue réellement ou est-ce qu’on est absorbé par la propagande gouvernementale ? Pourquoi les autorités sanitaires n’ont pas dépisté, isolé, et traité dès le début comme avec n’importe quelle infection contagieuse ? Pourquoi ce virus-là est-il plus important que les autres ?

Quand la peur devient psychose collective

Tous les jours les médias nous balancent le nombre de morts imputables au virus pour maintenir l’angoisse. Sans relativiser, on peut penser que c’est une catastrophe sans précédent, 29000 morts en trois mois. Il est évident que des situations dramatiques ont lieu. Et elles n’ont malheureusement rien d’exceptionnel. En 2019 en France, plus de 600 000 personnes sont décédées, pour majorité pas de mort naturelle mais d’un cancer causé par ce mode de vie. 80% des patients hospitalisés en réanimation et des décès présentaient des comorbidités. L’espérance de vie en bonne santé est de 64 ans chez les femmes et 62 chez les hommes, avec de grandes différences entre les cadres et les ouvriers. On pourrait jouer avec les chiffres pendant longtemps. On a l’impression de s’approcher de la vérité. Interpréter des données exige aussi de les confronter à l’Histoire et au rapport social dans lequel nous vivons. Nous ne sommes pas des experts et nous n’avons pas besoin d’eux pour comprendre les situations.

L’épidémie de Covid-19 a transformé la peur en psychose collective. La distanciation sociale est devenue rapidement une obsession. Mais réalisons-nous vraiment les conséquences d’un tel acte pour une espèce comme la nôtre ? Quelles conséquences physiques, psychologiques et sociales ont les confinements sur les populations (et particulièrement les femmes, les enfants, les personnes âgées, sans oublier celles et ceux qui vivent dans la rue, dans des logements insalubres, dans la misère) ? Empêcher les gens de circuler, de se parler, de se toucher pour soi-disant sauver des vies. Enfermer, diviser, réprimer pour éviter d’être contaminé. Mais quel est l’intérêt de vivre de la sorte ? N’est-ce pas un premier pas vers le totalitarisme ?

La peur comme outil de domination

Les capitalistes maintiendront leur système et leur pouvoir par tous les moyens nécessaires, quoi qu’il en coûte. Il ne faut ni les sous-estimer (en les croyant incompétents face à la crise) ni les sur-estimer (croire que tout est prévu depuis trois siècles). Les bourgeois sont formés aux mensonges pour protéger leurs intérêts de classe. Ils jouent sur des cordes sensibles pour assurer une obéissance d’une large partie de la population. Ils réunissent des médecins et des scientifiques acquis à leur cause pour nous faire croire que le confinement sauve des vies. Ils utilisent tous leurs médias pour diffuser à longueur de journée leur propagande. La bourgeoisie a des plans, des feuilles de routes à tenir, et en fonction des régions où elle opère, elle s’adapte, elle complote contre le prolétariat, les objectifs restent les mêmes : l’exploitation de notre force de travail, l’accumulation du capital, la reproduction élargie, la production de la plus-value. Les moyens sont toujours les mêmes : diviser pour régner, faire peur, intimider, réprimer avec la police et l’armée, emprisonner ou tuer.

Cette crise a le mérite de montrer les multiples visages de l’État, qu’on avait oublié, sous nos latitudes, depuis la seconde guerre mondiale : celui de gardien et de gestionnaire du capital. Celui répressif qui s’impose jusqu’à notre intimité, celui qui ordonne le contrôle social, qui veut nous apprendre à nous laver les mains. Beaucoup ont cru toutes ces années à la fable de l’État providence, l’État protecteur des droits des citoyens, l’État canalisateur des rapports sociaux. Certains aujourd’hui réclament plus d’État et appliquent avec zèle le confinement. Dans leurs bouches l’État est une religion, avec ses dogmes et ses procédures, qui serait un rempart contre le méchant capitalisme libéral. Mais nous savons que toute religion est basée sur la peur. Une population apeurée est prête à sacrifier la liberté au profit d’un État sécuritaire dont le capital a besoin en temps de crise.

La volonté d’instaurer une psychose générale dans la population est un mécanisme efficace de contrôle social. Quoi de mieux qu’un virus pour répandre une peur paralysante ? Les luttes se sont arrêtées du jour au lendemain. Le confinement est un exercice géant de mise au pas du prolétariat. Car avec un virus, qu’on nous vend très dangereux et très mortel, chacun d’entre nous est un danger pour l’autre, le doute nous envahit. Les rassemblements sont interdits, la vie sociale n’est plus la même. La bourgeoisie n’a pas meilleur outil pour ramener la lutte de classe à son avantage. Ce virus est plus important que les autres car il est un écran de fumée pour déclencher la crise systémique, qui couve depuis la dernière en 2008, par décision administrative, afin de restructurer le capital. Il est l’alibi parfait, le coupable idéal. La dévalorisation engendrée par la crise économique va faire plus de morts que le virus. Et il n’y aura pas de confinement du capitalisme pour eux. À la peur du virus suivra la peur de perdre son emploi, la peur du déclassement et de la misère.

La peur de mourir ou la peur de vivre

Cette crise a aussi le mérite de nous questionner sur le sens de la vie. La maladie et la mort sont des sources importantes d’angoisses. Dans les pays capitalistes avancés, on en arrive à s’étonner que des personnes âgées ou malades meurent. On veut prolonger l’existence à tout prix, même dans la souffrance. Mais le progrès ce n’est pas de vivre toujours plus longtemps mais de vivre pleinement, librement. A-t-on oublié que la vie est une maladie mortelle ? On se croit fort, on refoule la mort, dans une immunité absolue, certains ont accès à des médicaments et des traitements performants. La société spectaculaire marchande, à force d’individualiser l’existence, nous pousse à nous croire unique, exceptionnel, on devient égocentrique, alors que nous avons tous les mêmes vies uniformisées, prolétarisées. Notre rapport à la vie et à la mort s’en trouve déformé. Nous avons peur de l’évidence. Nous avons oublié que nous sommes une espèce sociale, une collectivité d’individus qui sont des continuités entre eux et entre les générations. La vie est fragile, on ne la protège pas en enfermant les gens mais bien en s’entraidant les uns les autres, en construisant un monde meilleur.

La peur qui fait avancer

La bourgeoisie a peur sinon elle n’agirait pas ainsi. Elle a peur de l’embrasement général qui la jettera dans la poubelle de l’Histoire. Avec l’aval des syndicats et des partis, elle met en place un état d’urgence permanent pour interdire les rassemblements ou pour obliger certains salariés à rester enfermés chez eux en télétravail. Elle veut nous atomiser, elle sait que face à la crise nous avons l’opportunité de détruire le capital une bonne fois pour toutes. Les périodes troublées font ressortir ce qu’il y a de pire chez certaines personnes comme, par exemple, la délation. Face à la peur notre instinct de survie nous donne plusieurs choix : le repli sur soi, la fuite, le déni ou, l’affrontement, la lutte, l’entraide. Au sein du prolétariat, la colère est immense. Nous pouvons transformer cette rage, dépasser nos peurs, en organisant la contre-attaque. En s’organisant dans nos quartiers en comités d’habitants, dans les entreprises en comités de grève. En luttant ensemble, la peur disparaît, on se sent utile. Nous ne sommes pas des victimes, nous n’adhérons pas au consensus hygiéniste et à la discipline imposés par l’État. Nous voulons bâtir un monde dans lequel l’inégalité sociale n’a pas de place, un monde dans lequel la liberté n’est pas négociable.

Comment renverser les Illuminati ?

garap-illuminati-cover

Le document que nous publions ici sous forme de brochure est une adaptation en langue française du pamphlet « How to overthrow the illuminati ? » réalisé par des camarades révolutionnaires étasuniens (membres ou proches de groupes comme « Black Orchid Collective », « Take Back the Bronx », « Creativity Not Control »). http://overthrowingilluminati.wordpress.com/

Nous avons apporté différentes modifications ainsi qu’un certain nombre d’ajouts à la version d’origine. Ainsi, plusieurs aspects historiques de la théorie du complot Illuminati sont précisés et/ou ajustés ; des éléments de l’analyse générale sont calibrés aux spécificités du déploiement du conspirationnisme en France (conditions, manifestations, agents). Au-delà, ce texte intéressera tout individu francophone qui souhaite connaître les origines, les ressorts, les promoteurs de cette funeste mystification et les arguments permettant sa nécessaire démolition.

La théorie du complot Illuminati est le modèle-type de la camelote sous-fasciste. Kit idéologique de mauvaise facture, elle réclame, chez les clients qu’elle cible, les mêmes dispositions mentales que celles cultivées par le divertissement de masse : réceptivité acritique, dictature de l’émotionnel détraqué, stupidité, grégarisme, haine. Une nuance, cependant, la distingue de la ration spectaculaire standard, et tient en ceci qu’elle est une commercialisation de la peur élevée au degré de la paranoïa, de la séparation du sujet d’avec lui-même et son environnement frôlant la schizophrénie. Evidemment, ce vulgaire prêt-à-penser réactionnaire ne peut que plonger dans la plus pathétique des confusions les consommateurs qui s’y adonnent (le plus souvent compulsivement). Le caractère invasif de ce produit réside dans la faible texture des mystifications qu’il porte, ce qui le rend compatible avec d’autres poisons idéologiques : étant structurellement un amalgame ductile, il se dilue facilement dans des systèmes discursifs d’origines et de qualités différentes. On le retrouve, par exemple, enveloppé des pets verbaux du haraceleur-exhibitionniste-raciste Alain Soral, rythmant les bouffonneries rapologiques du fils à papa Rockin Squat ou du prêcheur islamiste Mysa, ou incrusté dans les divagations de prédicateurs trinitaires, salafistes, évangéliques, ou encore à l’appui de délires satanistes… Mais l’intempestif envahissement de la théorie du complot Illuminati découle aussi de sa haute conformité au dispositif de coercition social qu’est internet : A l’image du vecteur qui le diffuse, ce produit arbore une authentique participation sociale (en contre-point des vieux supports médiatiques, comme la télévision) qui pourtant n’a jamais été autre que factice. En ce sens, le conspirationnisme anti-Illuminati est bel et bien une maladie de notre temps, concoctée avec les microbes antisociaux qu’a su propager, à chacune des étapes de son développement structurel, la Société du Spectacle.

En finir avec cette grotesque supercherie, c’est participer au nécessaire ménage que la conscience prolétarienne doit opérer en son sein. C’est aussi relier directement cette pollution mentale, et toutes les autres, au rapport qui les sécrète pour mieux s’y dissimuler : le capitalisme.

La SUITE et la brochure sur le site du GARAP

Chronique du quotidien

Il y a des jours où on n’a envie de rien. T’es au taf. Tu regardes autour de toi. Pas grand monde. Mois de juillet oblige. Un calme apparent. Dehors ciel gris et lumière bizarre qui pète les yeux. Que pourrais-je faire d’intéressant aujourd’hui ? Bosser ? Pas trop. Le minimum syndical. Lire ? Fatiguant. Regarder une vidéo ? Pas envie. Écrire ? Ah oui écrire que je n’ai envie de rien. C’est déjà pas mal. Mais inutile.

Nature Desert

Seul

Comme disait Moustaki : « non je ne suis jamais seul avec ma solitude ». Il y a des jours où je me sens bien seul au milieu des autres. La routine du travail me fatigue lentement mais sûrement. C’est comme si je devais lutter chaque jour pour ne pas laisser mon esprit s’endormir sous le poids de la lassitude. Mais heureusement mon esprit critique ne s’éteint jamais, il y a toujours cette petite étincelle qui relance la machine. Et c’est cette même étincelle qui me tient à l’écart du troupeau. Non pas que je me croissse supérieur aux autres, ça n’a aucun sens, c’est juste que mes recherches, de compréhension et de critique de la société dans laquelle nous vivons, me maintiennent à l’écart de la masse des autres personnes. Même s’il y a beaucoup de sujets sur lesquels on peut se retrouver, l’écrasante majorité des gens restent dans la discussion contemplative tandis que je suis dans la recherche de l’alliance de la théorie et de la pratique, dans la praxis, dans le matérialisme dialectique. Mes idées m’éloignent des autres alors que ce sont des idées de vivre ensemble et de partage. C’est fou comme cette société a réussi à nous diviser, à nous individualiser d’une manière égoïste, à nous maintenir dans un état de peur permanent. Les mauvais jours, j’ai des idées noires, j’en veux au monde entier, j’ai la haine de l’autre, je n’ai envie de parler à personne tellement la bêtise ambiante m’étouffe. Des fois, j’aimerais faire machine arrière et devenir un mouton qui se pose pas trop de questions afin d’éviter la souffrance de trop comprendre la réalité. Comme ça je ferai ma vie comme tous ces abrutis. Mais il n’y a pas de retour en arrière possible, je suis allé trop loin dans ma compréhension du monde. J’en suis arrivé au constat dramatique que nous devons combattre ce monde, ce quotidien. Toute notre vie est une marchandise, tout est monnayable. Ma critique a atteint une radicalité qui me tient à l’écart des pensées de la masse et de mes proches. J’apparais comme un sectaire, un rêveur, un gauchiste, un anarchiste, ou un utopiste. Tous les qualificatifs qui excluent. Certaines conversations me transmettent des sentiments de haine ou de méfiance envers mes propos. Je parais peut-être prétentieux, professoral, donneur de leçon, alors que ce ne sont pas mes intentions. J’ai cette vision de la totalité qui me permet de comprendre que le totalitarisme marchand englobe jusqu’à notre intimité. Et que foule de gens adhèrent à ce mode de vie. Les processus psychologiques analysés entre autre par Wilhelm Reich et Guy Debord à l’œuvre au quotidien sont affligeants. L’individu roi domine les façons de se comporter. Chacun se vend, se ment, s’aliène à travers le mode de production capitaliste. A force de lectures et de réflexions, le monde m’apparaît de plus en plus clairement comme un énorme spectacle qu’il faut transformer de fond en comble. Du coup les petits soldats du capital sont contre moi, ils défendent leurs prisons. Pourtant mes idées sont belles. J’ai peut-être la naïveté de croire qu’en les exposant, les gens adhéreront et voudront être libres. Je suis allé trop loin dans la connaissance de notre condition prolétarienne. Ça peut faire souffrir de comprendre la réalité. Heureux est l’ignorant car il ne se pose pas de questions. Il subit le quotidien sans réfléchir. Moi je ne peux pas vivre tranquillement dans un monde aussi pourri. C’est pour ça que mes théories se pratiquent. La théorie n’est rien sans la pratique. Mort au capital.

Seul